Les impressionnants résultats électoraux de l’extrême droite anti-immigration ont poussé le président français Emmanuel Macron à dissoudre l’Assemblée nationale et à convoquer des élections législatives anticipées. Mais sur le terrain de football, tous les discours de droite sur les « hordes d’envahisseurs » ont disparu, tandis que les supporters français encourageaient leur équipe nationale dirigée par des joueurs d’origine étrangère lors du tournoi européen quadriennal de football. Les bons résultats du football français semblent transcender l’ethnocentrisme politique, du moins pour le moment.

Sur le plan politique, le parti populiste d'extrême droite RN (Rassemblement national) a obtenu d'excellents résultats aux élections du Parlement européen, avec 31 % des voix. Par la suite, au premier tour des élections législatives du 30 juin, le RN a remporté environ 33 % des voix, loin devant les 28 % de la gauche et les 20 % du parti de Macron. Selon Reuters, le parti anti-immigration devrait remporter entre 235 et 265 sièges à l'Assemblée nationale lors du prochain second tour, le 7 juillet, soit une énorme augmentation par rapport aux 88 sièges actuels, et peut-être la première fois que l'extrême droite serait élue au pouvoir en France.

Mais le succès politique du RN, parti d’extrême droite anti-immigrés, ne se reflète pas sur les terrains de football. L’équipe de France de football, acclamée par toute la nation, a atteint les quarts de finale du Championnat d’Europe. « Des hordes envahissantes » ? Quinze joueurs d’origine étrangère figurent sur la liste officielle des vingt-trois joueurs français. Sur les onze titulaires, huit sont d’origine étrangère.

La star et capitaine de l'équipe, reconnu comme l'un des meilleurs joueurs du monde, est Kylian Mbappé. Son père est originaire de l'île camerounaise de Djébalè et sa mère est d'origine algérienne kabyle. Le penalty de Mbappé à la 55e minute contre la Pologne a sauvé la France d'une défaite embarrassante lors d'un match du premier tour.

En dehors du terrain, Mbappé et un jeune leader du RN, Jordan Bardella, un potentiel futur Premier ministre et lui-même fils d'immigrés italiens, se sont affrontés. Mbappé avait encouragé les jeunes à voter, sous-entendant qu'ils devaient rejeter les extrémistes de droite. « Je vois des extrémistes aux portes du pouvoir », a-t-il déclaré. « Les jeunes qui ont la possibilité de choisir l'avenir du pays devraient voter. »

En réponse, Bardella a déclaré : « J'ai beaucoup de respect pour nos footballeurs, que ce soit Marcus Thuram ou Kylian Mbappé, qui sont des icônes du football et des icônes pour la jeunesse… Mais il faut respecter les Français, il faut respecter le vote de tout le monde. »

Bien qu'il ait qualifié Mbappé et Thuram d'« icônes », la position anti-immigrés de Bardella est évidente. Il a déclaré à un groupe en mars : « Il est tout à fait clair que ces élections [for the European Parliament] « Le 9 juin, il y aura un référendum contre la submersion par les migrants », a-t-il déclaré lors du premier meeting de campagne du parti. « C'est aux Français de décider qui est autorisé à entrer sur le territoire et qui ne l'est pas. Avec nous [RN] « La France protégera ses frontières », a-t-il affirmé devant une foule en liesse.

(Jeune Afrique (Il a été rapporté que l'arrière-grand-père de Bardella était un travailleur immigré d'Algérie, un fait qui reste tabou au sein du RN, autrefois appelé Front national, parti fondé par le raciste et antisémite Jean-Marie Le Pen et aujourd'hui dirigé par sa fille Marine Le Pen. Bardella est son protégé.)

Que voulait dire Bardella par « respecter les Français » ? « submergés par les migrants » ? « protéger ses frontières » ? Sur le terrain, l’équipe nationale française est carrément multinationale. Le gardien de but, Bruce Samba, est né en République du Congo. N’Golo Kanté, considéré comme l’un des meilleurs milieux de terrain de sa génération, a des parents maliens. Un autre pilier, Eduardo Celmi Camavinga, est né en Angola. L’arrière-grand-père de Dayot Upamecano était roi d’un village de Guinée-Bissau d’où ses parents sont originaires. Ferland Mendy est d’origine sénégalaise et bissau-guinéenne. Jules Koundé a la nationalité française et béninoise. Aurelian Tchouameni est d’origine camerounaise. Youssaf Fofana a la nationalité française et malienne. Les parents de Randal Kolo Muani sont nés à Kinshasa, en République démocratique du Congo. Il possède la double nationalité française et congolaise. Marcus Thuram est né en Italie. Bradley Barcola possède la nationalité française et togolaise.

Alors que l’extrême droite continue de progresser électoralement, l’équipe nationale de football, Les Bleuspoursuit son excellence avec une équipe très diversifiée. Économiste Le Français a souligné les récents succès de l'équipe : « L'équipe a atteint la finale de la Coupe du monde et du Championnat d'Europe lors de trois des quatre dernières éditions ; en effet, lors des 13 dernières éditions de ces compétitions, la France a atteint la finale à six reprises. Aucune autre équipe européenne ne peut se targuer d'un bilan aussi impressionnant sur la même période. »

L'équipe française gagnante est composée de héritiers du colonialisme français que l'extrême droite refuse d'accepter comme pleinement intégrés à la France. La cheffe du RN, Marine Le Pen, est allée jusqu'à proposer l'abolition de la double nationalité. Bardella s'est montrée plus circonspecte, affirmant que dans un gouvernement RN, seuls certains postes stratégiques seraient réservés aux citoyens et ressortissants français. Mais la position du RN, « la France aux Français », est tout à fait claire.

La citoyenneté et la double nationalité ne sont jamais simples. Dans l'affaire historique des années 1950 Nottebohm, La Cour internationale de justice a défini la nationalité comme un lien juridique entre une personne et un État « ayant pour base un fait social de rattachement, un lien authentique d’existence, d’intérêts et de sentiments, ainsi que l’existence de droits et de devoirs réciproques ». La clé est « un fait social de rattachement ». L’équipe de France multinationale est acclamée par les supporters français de football, y compris, nous le supposons, ceux qui ont voté pour le RN aux dernières élections comme ayant « un fait social de rattachement ». Pour les supporters, les joueurs multinationaux sont français.

Ou sont-ils?

Deux experts du football qui connaissent bien la France m’ont expliqué la dissonance entre ceux qui votent à droite et ceux qui soutiennent l’équipe nationale des « étrangers ». Ils ont pris l’exemple du grand joueur de tennis Yannick Noah, dont le père était camerounais. Lorsque Noah a remporté Roland Garros en 1983, premier Français à remporter Roland Garros depuis trente-sept ans, il a été traité comme un héros national. Il était français. Lorsqu’il perdait des matchs, on l’appelait « le Camerounais ». Pour les experts, l’ethnocentrisme français disparaît pour les vainqueurs sportifs.

Alors que l'on regarde les fidèles supporters français encourager leur équipe lors du Championnat d'Europe, on s'interroge sur les cris des supporters : « Allez Les Bleus« Tous les fans, y compris les supporters de RN, sont-ils vraiment derrière Les Bleus comme vraiment français ? En regardant les supporters français, on voit bien que la France est unie derrière l'équipe et que tous les joueurs sont considérés comme français, tant que l'équipe continue à gagner.

Source: https://www.counterpunch.org/2024/07/05/french-european-soccer-nationalism-transcends-xenophobia-at-least-for-the-moment/

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