La première chose à dire est que la Chine, malgré tout le battage médiatique, n’est pas le principal créancier du Sud global. Les créanciers privés comme les fonds d’investissement et les grandes banques détiennent plus de 50 % de la dette souveraine des pays en développement. Les autres détenteurs sont les prédateurs multilatéraux dont la Banque mondiale, le FMI et les puissances impériales traditionnelles du Club de Paris.
La Chine s’est désormais imposée comme un nouveau créancier. Ses banques d’État, ses entreprises publiques et ses entreprises privées ont considérablement augmenté leurs prêts aux pays du Sud, devenant détenteurs d’importants montants de dette souveraine.
Contrairement à la Banque mondiale et au FMI, cependant, la Chine n’impose pas de conditionnalités néolibérales et de programmes d’ajustement structurel. Mais soyons clairs, ce n’est pas de la philanthropie. C’est une nouvelle superpuissance capitaliste en concurrence avec les États-Unis, les puissances européennes et le Japon.
À ce titre, elle utilise ses emprunts pour faire avancer ses intérêts. Il finance des pays pour développer des industries afin d’exporter des matières premières vers la Chine, d’ouvrir leurs marchés aux entreprises chinoises et de garantir leur allégeance géopolitique.
Au milieu de la nouvelle crise de la dette, le FMI et la Banque mondiale ont demandé à la Chine de réduire ses avoirs et de les renégocier. La Chine a répondu en disant qu’elle annulait déjà une partie de sa dette, la restructurait et reportait les paiements. Ils le font pour amener les pays endettés à suivre leurs diktats de politique étrangère.
Par exemple, la Chine a convaincu quinze à vingt pays d’Afrique de renoncer à la reconnaissance de Taïwan et d’obliger Taipei à fermer ses ambassades. En conséquence, il n’y a qu’un seul pays sur le continent qui reconnaît Taiwan comme un pays indépendant.
Dans le même temps, la Chine a révélé l’hypocrisie de la prétention de la Banque mondiale et du FMI à l’annulation de la dette. Il a souligné que si les institutions financières internationales annulent une partie de la dette, elles ne l’abolissent jamais. Il a ainsi traité de bluff les autres puissances et exposé toutes leurs renégociations de dettes comme une mascarade.
La Chine a raison. Prenons l’exemple du Congo. Le FMI et la Banque mondiale ont affirmé avoir arrêté le remboursement de la dette du pays, mais ils mentent. En réalité, ils ont créé un trust dans lequel des puissances impérialistes comme la France, la Belgique et les Pays-Bas déposent des fonds pour le Congo. Le FMI et la Banque mondiale tirent ensuite des fonds de cette fiducie pour rembourser leurs prêts.
La Chine s’est également opposée au déséquilibre des pouvoirs au sein du FMI et de la Banque mondiale. Ils ont souligné que les États-Unis détiennent toujours plus de 15 % des voix, ce qui permet à Washington de contrôler efficacement les deux. En revanche, la Chine, malgré son statut de deuxième économie mondiale, n’en compte que 6 %. Ainsi, il a fait la demande raisonnable pour la redistribution du pouvoir de vote.
Frustrée par le refus de Washington de se conformer à sa demande, la Chine ainsi que le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud ont créé la BRICS Bank, la nouvelle banque de développement. Elle a son siège à Shanghai et sa nouvelle présidente est l’ancienne présidente du Brésil, Dilma Rousseff. La Chine prétend qu’elle est une alternative à la Banque mondiale et au FMI. Ce n’est pas. Il finance exactement le même type de projets extractivistes que le capital occidental a soutenus dans le monde en développement.
Malgré l’ouverture de cette banque multilatérale, le principal moyen utilisé par la Chine pour accorder des prêts aux pays ne passe pas par elle, mais par ses banques d’État, ses entreprises d’État et ses sociétés privées. Pourquoi? Car la Chine sait, tout comme les États-Unis, que si les banques multilatérales sont utiles, le meilleur moyen de contrôler les pays passe par les relations financières bilatérales. Ainsi, les banques et les entreprises chinoises restent au cœur de leurs opérations de prêt internationales.
Il suit la stratégie mise en place par les États-Unis avec le plan Marshall après la Seconde Guerre mondiale. Washington a accordé des subventions et des prêts aux pays de manière bilatérale pour financer la reconstruction et assurer son influence géopolitique contre l’Union soviétique. La Chine fait de même pour s’assurer l’allégeance des pays du Sud et rivaliser avec les anciennes puissances impérialistes.
S’il faut le souligner, il faut éviter toute diabolisation de la Chine. Ce n’est pas pire que les États-Unis, la France ou la Grande-Bretagne.
Source: https://www.counterpunch.org/2023/07/28/resisting-the-debt-system/