Le 7 février, les huit plus grands syndicats français ont organisé la troisième grève de l’année contre les réformes des retraites profondément impopulaires d’Emanuel Macron. Le combat pour empêcher le relèvement de l’âge de la retraite de 62 à 64 ans a galvanisé les salariés français. Le 7 mars, les syndicats français se sont engagés à se mobiliser pour la sixième grève du pays depuis le début de l’année. Cette vidéo fait partie d’une émission spéciale Travailleurs du monde série sur la crise du coût de la vie en Europe.
Producteur, vidéaste, monteur : Brandon Jourdan
Producteur associé, Traduction : Nicolas Lee
Post-production audio : Tommy Harron
Cette histoire, avec le soutien du Fondation Berthefait partie de The Real News Network Travailleurs du monde série, racontant les histoires de travailleurs du monde entier construisant un pouvoir collectif et redéfinissant l’avenir du travail selon leurs propres termes.
Transcription
Brandon Jourdan [Narrator]: La colère a explosé dans les rues françaises alors que le président Emmanuel Macron promet de faire passer les réformes des retraites malgré l’opinion populaire et une nouvelle vague de grèves à l’échelle nationale.
Daniel Ferté, Inspecteur Billetterie, FO Cheminot (Fédération des Cheminots) : Aujourd’hui, nous sommes dans une situation où le gouvernement gouverne contre sa population, car la grande majorité de la population est opposée à la réforme, notamment les travailleurs. Selon les sondages, 9 personnes (travailleurs) sur 10 sont opposées à la mise en place de cette réforme.
Gaëlle Cavelier, Confédération Paysanne (Confederation of Farmers): Cette réforme est très impopulaire, on la voit partout en France. Les Françaises et les Français sont tous contre cette retraite [reform]. Il me semble que le gouvernement est complètement seul. Ils ont décidé de faire passer la réforme des retraites comme un bulldozer, sans écouter personne.
Brandon Jourdan [Narrator]: Le 7 février 2023, les huit plus grands syndicats de France se sont engagés dans la troisième grève nationale de masse en un mois. Il s’agissait de la première de deux grèves nationales survenues au cours de la semaine, la seconde ayant eu lieu le 11 février. Les grèves s’opposent aux projets du président Emmanuel Macron, qui prévoient notamment de relever l’âge de la retraite de 62 à 64 ans et d’augmenter le nombre total d’années pendant lesquelles les personnes doivent cotiser pour bénéficier d’une retraite à taux plein. Le 7 février, des mobilisations ont eu lieu dans plus de 200 villes françaises. La Confédération générale du travail, ou CGT, a affirmé que près de 2 millions de personnes étaient descendues dans la rue, tandis que le ministère français de l’Intérieur a estimé le nombre à plus de 750 000 personnes.
Daniel Ferté, Inspecteur Billetterie, FO Cheminot (Fédération des Cheminots) : Aujourd’hui, dans la manifestation, on retrouvera absolument tous les secteurs professionnels qui existent parmi les ouvriers, des sidérurgistes aux transporteurs routiers, aux cheminots, aux enseignants.
Maud Valegeas, Teacher, SUD Education union (Solidaires Unitaires Démocratiques: Tous les métiers existants sont présents aujourd’hui. Il y a eu une très grosse mobilisation le 19 janvier, et le 31 janvier aussi, qui n’avait jamais réuni autant de monde dans les rues. La mobilisation que nous vivons aujourd’hui est historique car il y a une unité syndicale très large, où toutes les organisations appellent à la mobilisation contre le projet de réforme des retraites. Cela ne s’était pas produit depuis 25 ans, d’avoir autant de syndicats appelant à la mobilisation. Nous avons des syndicats du secteur privé et du secteur public.
Brandon Jourdan [Narrator]: Le transport en commun et les chemins de fer ont été perturbés, les raffineries de carburant ont ralenti leur production, la production d’électricité a diminué et le trafic aérien a été affecté par les grèves.
Laurent Dahyot, secrétaire général, CGT Air France : Et aujourd’hui, on voit que la population se rassemble pour dire non à cette réforme.
Nous luttons contre cette réforme, mais nous luttons aussi contre la pénibilité du travail puisque nous sommes tous confrontés à la pénibilité du travail, que ce soit sur le terrain ou sous forme d’horaires décalés, de travail de nuit, de portage de charges. Pour le personnel de cabine, décalage horaire, toxicité dans les avions. En effet, la pénibilité des conditions de travail est un enjeu très important chez Air France et travailler plus longtemps, ce n’est tout simplement pas possible pour tous les salariés de l’aéroport.
Brandon Jourdan [Narrator]: Les agriculteurs ont également rejoint la manifestation de masse à Paris.
Gaëlle Cavelier, Confédération Paysanne (Confederation of Farmers): Nous voulons un statut de retraité pour les travailleurs agricoles afin d’avoir une pension décente. Actuellement, le ministre promet une pension brute de 1 200 €, mais ce n’est que pour les personnes qui cotisent à la caisse de retraite pendant toute leur carrière sans interruption. Peu d’ouvriers agricoles sont dans cette situation. De nombreuses ouvrières agricoles ont interrompu leur carrière pour un congé de maternité. Il y a des ouvrières agricoles qui ont un statut de conjointe collaboratrice, qui ne cotisent jamais à leur retraite, qui n’ont pas de statut social, donc pas de pension. Ils auront zéro euro.
Brandon Jourdan [Narrator]: De nombreux enseignants ont également quitté le travail pour se joindre aux manifestations.
Maud Valegeas, Teacher, SUD Education union (Solidaires Unitaires Démocratiques): Je suis Maud Valegeas. Je suis professeur de français dans un lycée de Seine-Saint-Denis et je suis membre du syndicat SUD Education.
Dans le secteur de l’éducation, nous étions très mobilisés le 31. Il y a deux mobilisations cette semaine, donc ce sera probablement réparti entre les deux dates. Mais en fait, il y a de plus en plus d’assemblées générales, de réunions et il y a l’idée de préparer une grande grève à répétition dans le secteur de l’éducation dans les semaines à venir. Le secteur privé est aussi en grève, comme nos collègues de PSA à Aulnay-sous-Bois.
Alors, la mobilisation, c’est très massif et il n’y a pas un secteur plus mobilisé qu’un autre. On voit aujourd’hui que tous les secteurs sont là.
Brandon Jourdan [Narrator]: Avec la masse des travailleurs, il y avait un important contingent de jeunes. Des adolescents ont bloqué des lycées et se sont parfois heurtés à la police anti-émeute.
Les adolescents qui bloquent l’école scandent :
Tout le monde déteste la police ! Tout le monde déteste la police ! Tout le monde déteste la police !
Brandon Jourdan [Narrator]: La grande marche à Paris a marché de l’Opéra Garnier à la place de la Bastille.Tous les principaux syndicats étaient présents, ainsi qu’un contingent de jeunes dynamique, et même des retraités présents par solidarité.
Jiménez, chauffeur de taxi à la retraite : Je m’appelle Jiménez, je suis à la retraite depuis quelques années maintenant et je suis ici pour défendre la retraite à 60 ans pour mes enfants et petits-enfants. Écoutez, le contexte est très simple. Si le peuple ne se mobilise pas, l’âge de la retraite ne sera pas à 64 ans, il sera poussé à 67 voire 70 ans peut-être.
La foule chante :
Retraite! C’est le nôtre!
Nous nous sommes battus pour le gagner !
Nous nous battrons pour le garder !
Retraite! C’est le nôtre!
Nous nous sommes battus pour le gagner !
Nous nous battrons pour le garder !
Brandon Jourdan [Narrator]: De petits groupes de personnes utilisant les tactiques du Black Bloc ont commis des actes de destruction ciblée de biens contre des banques, des chaînes d’entreprises et des compagnies d’assurance. Des gaz lacrymogènes et des accusations de police ont suivi, ciblant souvent toute personne qui se trouvait sur le chemin. Malgré l’agression policière, la grande manifestation s’est poursuivie jusqu’à Bastille. À la tombée de la nuit, de la musique a retenti sur la place, des chants ont retenti et des fusées éclairantes colorées ont illuminé le ciel nocturne.
La grève nationale a été suivie d’une autre mobilisation massive le 11 février.
Le mois prochain s’avérera être une bataille décisive dans la lutte en cours pour préserver le filet de sécurité sociale de la France. Une grève générale impliquant tous les principaux syndicats est prévue pour le 7 mars, où les syndicats menacent de « paralyser la France ».
Daniel Ferté, Inspecteur Billetterie, FO Cheminot (Fédération des Cheminots) : Et si nous devons bloquer l’économie du pays, nous le bloquerons. Si nécessaire, nous bloquerons tous les transports.
Gaëlle Cavelier, Confédération Paysanne (Confederation of Farmers): Un durcissement de la contestation reviendrait à aboutir à une grève générale et à bloquer totalement le pays.
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Source: https://therealnews.com/the-people-vs-capital-french-unions-continue-fight-against-macrons-pension-reforms