“Tout le monde déteste la police!” – Tout le monde déteste la police – a été scandé lors de manifestations et d’émeutes à travers la France la semaine dernière. Le déclencheur a été un événement à la fois exaspérant et tristement familier : le meurtre d’un jeune noir innocent de 17 ans, Nahel Merzouk. L’adolescent de Nanterre, dans la banlieue ouest de Paris, a été interpellé par la police pour avoir conduit dans une voie réservée aux bus. Quelques instants plus tard, il a été abattu après avoir été invité à retirer son permis.

La police a menti sur ce qui s’était passé, affirmant que Nahel avait tenté de les écraser. Mais quelqu’un avait filmé le meurtre sur son téléphone et bientôt les images ont circulé. Les deux policiers ont sorti leurs armes et, bien qu’ils n’aient fait face à aucune menace, l’un a choisi de tirer. Mounia, la mère de Nahel, a résumé la situation en disant : « Il a vu un visage d’Arabe, un petit garçon, et a voulu se suicider ».

Des émeutes ont éclaté à Nanterre et dans d’autres banlieues parisiennes, et dans les banlieues d’autres villes. La colère était palpable, des milliers de jeunes disant qu’ils ne laisseraient pas la police continuer à tuer et que Nahel ne mourrait pas en vain. Le syndicat de la police a répondu en qualifiant les manifestants de « vermine » et en ralliant leurs officiers pour rétablir « l’ordre républicain ». Cela signifiait l’arrestation de plus de 1 000 personnes en trois jours. Parmi les personnes arrêtées, l’âge moyen était de 17 ans.

C’était la montée du banlieues—des quartiers populaires et immigrés où la pauvreté est élevée et où les intimidations policières sont constantes. C’est une autre France : par une mesure à quelques kilomètres du centre de Paris, mais en réalité un monde à part.

Banlieues les populations sont discriminées économiquement et politiquement. Le nombre d’enfants issus de l’immigration en situation de pauvreté est nettement supérieur à celui des enfants blancs. Et comme c’est le cas partout, la crise du coût de la vie frappe de manière disproportionnée les classes populaires, en particulier celles de couleur. Dans le banlieues, il y a eu un sous-financement systématique des écoles et des services publics, qui met fin à l’idée que la France républicaine traite tout le monde sur un pied d’égalité. Comme le dit une déclaration commune des syndicats français en réponse au meurtre de Nahel :

“Comment croire à l’égalité quand certains quartiers se retrouvent sans services publics, quand ils restent isolés faute de transports accessibles, de médecins et d’hôpitaux de proximité… Ces jeunes se retrouvent en résidence surveillée sociale et géographique.”

Beaucoup dans le banlieues viennent d’Afrique de l’Ouest et des pays arabes d’Afrique du Nord. Les jeunes hommes sont vingt fois plus susceptibles d’être arrêtés par la police que les autres citoyens.

Sous le président Emanuele Macron, la police est devenue plus militarisée et a acquis plus de pouvoirs. Une loi de 2017 donnant aux flics plus de latitude pour tirer sur les conducteurs était un mandat de mort anticipé pour Nahel. Depuis l’adoption de la loi, les fusillades policières contre des automobilistes ont été multipliées par six, selon des chercheurs français qui ont partagé leurs découvertes avec le New York Times. La police est également profondément infiltrée par des idées fascistes…bien plus de la moitié soutenu des candidats présidentiels fascistes comme Marine Le Pen ou Éric Zemmour lors de la dernière élection, selon un sondage de Radio France.

La classe dirigeante française dit que la France est daltonienne, traitant tout le monde de la même manière, quelle que soit sa race ou sa religion. C’est risible compte tenu des divisions raciales extrêmes dans le pays et de l’influence profondément enracinée de l’Église catholique. Mais aussi, l’histoire de France est une histoire de conquête coloniale, de déni des droits fondamentaux aux sujets coloniaux et de vagues successives d’immigrants, dont beaucoup viennent de pays à prédominance musulmane.

Au cours des dernières décennies, la guerre contre le terrorisme et le traitement barbare des réfugiés dans toute l’Europe ont accru la répression islamophobe sanctionnée par l’État. Chaque vague de migrants a été traitée avec hostilité, conduisant à leur concentration dans les périphéries des grandes villes.

Les émeutes n’étaient que la dernière manifestation de la profonde aliénation politique des banlieues. Ces communautés n’ont pas été intégrées au capitalisme français sous la bannière du multiculturalisme, comme en Australie, ou à travers un clientélisme à la Tammany-hall, comme aux États-Unis. Ils sont disproportionnellement pauvres, sans emploi et victimes de harcèlement et d’abus quotidiens. La combinaison de la répression et de l’abandon conduit inévitablement au genre d’explosions politiques vues la semaine dernière.

Tragiquement, la gauche française a peu de racines dans ces communautés, et est donc incapable de fournir une direction politique. Le Parti communiste, longtemps hégémonique sur la large gauche, a passé la majeure partie du XXe siècle à s’opposer aux mouvements anticoloniaux dans l’Empire français. Il a également accepté pour argent comptant le racisme implicite dans le soi-disant laïcisme français, qui a toujours été utilisé pour attaquer les minorités religieuses. Alors que la gauche révolutionnaire a adopté des positions de principe contre l’impérialisme, elle aussi n’a pas réussi à défendre systématiquement les droits des musulmans à porter le hijab, à se présenter à des fonctions publiques, etc.

Les grands médias et la droite politique rejettent les émeutes comme une violence insensée. Même des sections de la gauche ont condamné les émeutes dans le passé, critiquant les émeutiers pour avoir saboté leur propre cause et assimilant la violence de la police à celle des opprimés. Mais cette fois, les choses ont été différentes.

En partie à cause de l’impact du mouvement Black Lives Matter aux États-Unis, la gauche française a réagi avec plus de sympathie à cette dernière rébellion, les syndicats les plus à gauche se joignant aux militants pour dénoncer la police et l’État pour son action économique et politique. l’oppression des communautés ouvrières migrantes. Jean-Luc Mélenchon, chef du groupe de gauche La France Insoumise, a également fait de bonnes déclarations en réponse à la violence, insistant sur le fait qu’il ne peut y avoir de paix sans justice. C’est un message qui a été griffonné sur tous les murs de Paris ces derniers jours.

Comme l’a dit Martin Luther King, les émeutes sont « le langage de l’inouï ». Ils révèlent de profonds puits de colère et de frustration, et bien qu’ils ne soient pas les méthodes promues par les socialistes, ce sont indéniablement des actes de rébellion politique collective.

Pourtant, la France est profondément polarisée. Malgré l’importante solidarité montrée à la famille de Nahel, l’effet global des émeutes a été de renforcer l’extrême droite réactionnaire. Marine Le Pen a saisi le moment pour une campagne de recrutement à son parti du Rassemblement national, envoyant un e-mail de masse valorisant la police et appelant à « l’ordre ». A la suite du syndicat de la police, Jordan Bardella, un chef du parti, a qualifié les manifestants de “hordes sauvages” et dénoncé l’immigration. Un sondage d’opinion du 30 juin a montré que 39% des personnes soutenaient la réponse de Le Pen – le plus haut niveau de soutien de tous les politiciens.

Il est difficile de prédire la suite. Il y a une croyance largement répandue dans la classe dirigeante que l’extrême aliénation et la misère des banlieues doit être atténué dans une certaine mesure. Macron a été relativement contraint dans sa rhétorique jusqu’à présent, équilibrant un désir d’apaiser les tensions tout en renforçant la police.

Mais sans une réponse soutenue de la gauche et du mouvement syndical, il est difficile de croire que justice sera rendue pour Nahel, ou pour l’une des nombreuses autres victimes de violences et d’abus policiers. Bien qu’il soit positif que les principaux syndicats aient publié des déclarations raisonnables, parler est bon marché lorsqu’il n’est pas soutenu par des actions. Ce n’est que par un mouvement de masse qui unit la jeunesse radicale, les minorités opprimées et le pouvoir du travail organisé que le racisme et l’exploitation inhérents à la société française peuvent être remis en cause.

Source: https://redflag.org.au/article/no-justice-no-peace-france

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